Edward a été diplômé du programme Seconde Chance à Manille après avoir passé 2 ans et demi en prison. Il est venu en France pour 3 semaines  afin d’apporter son témoignage dans les écoles et prisons où nous intervenons, ainsi qu’à des partenaires de l’association en France. Durant cette période, il a rencontré plus d’une centaine de jeunes et autant d’adultes avec un impact perceptible. Force est de constater que son témoignage interpellait les jeunes au vu des questions qui fusaient, et du calme qui régnait dans des groupes réputés des plus turbulents d’ordinaire. Voici le témoignage de son expérience en France qui l’a beaucoup marqué.

 

My Trip in France. By Edward Mallari.

Je m’appelle Edward Mallari. J’ai 25 ans et je viens des Philippines. Je connais l’association ACAY que j’ai rencontré lors de ma détention en prison pour les mineurs à Manille depuis mes 17 ans, avant d’être transféré dans une autre prison pour les adultes. Pendant ces deux années en prison, j’ai suivi les formations d’ACAY sur la connaissance de soi et le développement de la personnalité, comme la gestion de la colère, la pression du groupe d’amis, un coaching individuel pour n’en mentionner que quelques-unes. J’ai fait un travail sur moi-même, et j’ai peu à peu changé.

Je suis actuellement étudiant en école d’aéronautique à Manille, et je viens tout juste de terminer ma première année à l’université. C’est actuellement les grandes vacances aux Philippines, et avant la prochaine rentrée scolaire, j’ai souhaité venir ici partager mon expérience aux mineurs incarcérés, et aux collégiens qui suivent le programme de formation d’ACAY. C’est la deuxième fois que je viens en France, car j’étais déjà venu en 2013 pour passer les examens d’entrée à la Légion étrangère, où je n’avais pas été admis en raison d’un problème d’audition.

Je suis arrivé à Marseille le 23 mars dernier. Le lendemain matin, nous étions déjà dans une école où je donnais mon témoignage, et l’après-midi, nous étions à l’Etablissement pénitentiaire pour les mineurs de Marseille. Les jours se sont succédés et les interventions également dans différentes écoles, prisons pour mineurs, centre social et partenaires d’ACAY dans la région marseillaise.

J’ai partagé mon expérience en prison aux Philippines. Nous étions soixante par cellule, et n’en sortions que rarement. Quand je donnais mon témoignage, je voyais dans les yeux de chacun des jeunes leur étonnement et leur intérêt portés à ma propre histoire. Même si nous ne sommes pas du même pays et de la même culture, à travers les échanges que nous avons eus, je me suis rendu compte que nous avions parfois vécu les mêmes choses dans nos vies.

Ils avaient beaucoup de questions et l’un d’entre eux m’a par exemple demandé comment j’avais réussi à gérer la colère que j’avais envers mon père, question qui m’a été également posé par plusieurs élèves dans les écoles. Un jeune récidiviste se demandait comment j’avais fait pour ne pas rechuter à ma sortie de prison. Je lui ai répondu qu’à chaque fois que je retournais chez moi, je retombais dans la drogue. Je lui ai expliqué que j’avais donc décidé après plusieurs rechutes de m’ouvrir et de dire la vérité aux gens qui m’entouraient. Ils m’ont aidé à mettre des mots sur ce que je ressentais, et puis j’ai fait confiance à l’équipe d’ACAY, et je suis parti un an dans une ferme pour suivre un programme de désintoxication. J’ai ensuite repris mes études et trouvé un travail, tout en ne retournant pas chez moi car ma bande d’amis m’aurait influencé négativement. Après leur avoir partagé cela, j’ai vu des larmes dans les yeux de certains et j’ai ressenti qu’il y avait un nouvel espoir dans leur cœur. Ce ne sont que quelques-unes des questions que les jeunes ont posées parmi tant d’autres : les problèmes de famille, de gestion des émotions, de drogues…

Les quelques moments de libres que j’ai eus entre les conférences ont été l’occasion de découvrir la région marseillaise, et des endroits magnifiques en France. J’ai également eu la chance de visiter l’entreprise ORECA « the motorship company », fidèle partenaire d’ACAY basée à Signes. J’ai vraiment été impressionné de voir toutes ces voitures de sport, et la production des pièces automobiles. Je souhaite devenir un professionnel et j’ai eu la chance de rencontrer par hasard à ORECA une équipe d’Asie avec des ingénieurs et mécaniciens philippins venus préparer leur Formule 3 avant la course du circuit de Silverstone en Angleterre. C’est difficile pour moi de décrire ce que j’ai ressenti en voyant tout ce professionnalisme, et la perfection de ces bolides. Cette expérience m’a ouvert l’esprit et je me dis qu’un jour j’aimerais travailler dans une entreprise comme celle-là, à un très haut niveau, et cela me donne encore plus de force pour continuer mes études d’aéronautique.

C’est une des expériences les plus heureuses que j’ai vécue dans ma vie, d’avoir partagé mon histoire à de nombreux jeunes, et d’avoir été une source d’inspiration en leur redonnant l’espoir, la force de croire en leurs rêves et la persévérance pour les atteindre.

Edward